Hôtel de la Préfecture et du Département

Construction du bâtiment
Jusqu’en 1867, le Préfet de Seine-et-Oise occupe à Versailles l'ancien bâtiment du garde-meuble de la Couronne, construit entre 1780 et 1796, et situé au 11 rue des réservoirs.
Suite au premier projet d'agrandissement de la préfecture à l'hôtel du Garde-meuble, demandé à l’architecte Hippolyte Blondel, qui s'avéra insuffisant, un nouvel emplacement fut choisi en 1861, celui de l'ancienne vénerie, dont l'acquisition fut faite en 1862.
Les projets de la nouvelle préfecture d’Hippolyte Blondel établis en 1861 n'ayant satisfait ni le préfet ni le Conseil général, il fut décidé de faire appel à d'autres architectes par voie de concours. Le programme du concours fut établi en janvier 1862, exigeant le dépôt des projets pour le mois de mai suivant. Il exigeait que la gendarmerie longe la rue Jean Houdon et soit séparée de l'hôtel de préfecture. Il était conseillé, si possible, d'utiliser les anciennes constructions de la vénerie. Le règlement spécifiait que les pièces déposées (plans et mémoires) ne devaient pas être signées. "Elles porteront chacune une épigraphe et un numéro, qui seront reproduits sur l'enveloppe d'une lettre cachetée, renfermant les noms, prénoms, qualité et domicile de l'auteur du projet". Le concours fut jugé par une commission nommée par le préfet.
39 projets furent déposés, 11 furent retenus à la première sélection. Les cinq concurrents classés en première ligne reçurent une prime. Le projet d'Amédée Manuel fut choisi en août 1863. Les travaux commencèrent en juillet 1864 et furent achevés en 1866. L'inauguration eut lieu le 19 juin 1867.
Amédée Manuel est issu d'une famille d'avocats et de négociants. Aucune autre construction, hormis quelques travaux dans divers immeubles versaillais, n’est connue de cet architecte. Il est par ailleurs l'arrière grand-oncle de M. Alain Schmitz, ancien Président du Conseil Général, actuel Sénateur des Yvelines.
Architecture
L’hôtel de la Préfecture s’inscrit au niveau architectural dans un style correspondant parfaitement à l’urbanisme versaillais. S’inspirant du modèle de l’hôtel particulier, entre cour et jardin, flanqué de deux ailes en équerre, il s’intègre également dans le grand style à la française insufflé depuis le début des années 1850 par les architectes de l'administration publique, à l’image d’Henri Labrouste (1801-1875) à la Bibliothèque nationale et Henri-Paul Nénot (1853-1934) à la Sorbonne.
La nouvelle construction doit également refléter la fonction et les qualités de l’administration qu’elle abrite : ainsi le couvrement tronconique du pavillon central vient rappeler qu’il s’agit d’un lieu de pouvoir. De même, le choix des grilles, de la cour d’honneur largement ouverte sur la ville et des bâtiments à jour passant, doit donner l’image d’une haute administration, elle-même transparente et inspirée par les lumières de l’esprit.
Siège du gouvernement sous la IIIème république
Inauguré en 1867, l’hôtel de la Préfecture se trouve occupé, dès le 20 septembre 1870, par le Prince royal de Prusse puis par son père le roi Guillaume jusqu’au 7 mars 1871.
Suite aux insurrections menant à la Commune, Versailles devient ensuite le siège du gouvernement. La Préfecture est alors la résidence des présidents de la République. Adolphe Thiers puis le maréchal de Mac-Mahon, et enfin Jules Grévy occupent successivement les lieux.
En 1879, le gouvernement est définitivement transféré à Paris. En 1880, l’hôtel de la Préfecture retrouve donc sa vocation première. Aujourd’hui il est le siège de la Préfecture et du Conseil Général.
Le décor intérieur
Pour donner vie aux volumes intérieurs, Manuel va s’entourer d’artistes de renom. La décoration murale sera confiée à des ornemanistes, stucateurs, doreurs. « L’art de Versailles », remis à l’honneur sous Louis-Philippe, triomphe. Pour les peintures, l’architecte fait appel à Alexandre Denuelle, peintre-décorateur qui fera lui-même travailler des artistes parisiens, souvent « Prix de Rome ».
L’orientation iconographique est inspirée de celle du château de Versailles; les allégories évoquent tout ce que l’État et son représentant se doivent de protéger et d’encourager, notamment les Arts, les Sciences et le Commerce. Il met aussi à l’honneur les emblèmes impériaux ainsi que ceux de la Seine et Oise.
Le rez-de-chaussée
Cabinet d’audience du préfet
Cette pièce est ornée d’une peinture signée S. Bouvier et datée de 1991, représente le bassin de Neptune dans le parc du château de Versailles, tandis que les quatre allégories des Arts, des Sciences, du Commerce et de l'Agriculture décorent les dessus-de-porte de Pierre Brisset (Paris 1810-1890).
Le très beau bureau double face, d'époque Louis XV, a servi à Mac-Mahon, lors de son passage à Versailles.
Sur la cheminée, la pendule symbolisant «l'Étude et la Philosophie», d'époque Louis XVI, a été réalisée d'après un modèle célèbre conçu par le sculpteur Simon-Louis Boizot (1743-1809).
Salon Erignac
Situé au centre du bâtiment, son décor illustre deux des tendances de l'art décoratif de l'époque, le néo-classicisme et le retour au passé. Le plafond, divisé en trois panneaux décorés d'ornements végétaux stylisés et de rinceaux d'acanthe interprète les arts du passé et du siècle de Louis XIV.
Depuis 1998, ce salon a été rebaptisé « Salon Erignac » en hommage au Préfet Claude Erignac, assassiné dans l’exercice de ses fonctions, le 6 février 1998.
Le petit salon
Cette pièce, d'après les plans de Manuel de 1863, faisait office de salle de billard comme en témoigne le lustre à deux suspensions. Au plafond, dans un ciel encadré par une balustrade en pierre, quatre amours soutiennent des guirlandes qui se réunissent à l'anneau du lustre. Les dessus-de-porte représentent les quatre Saisons sur des toiles marouflées d'Henri de Gray.
Le salon Thiers
Ce salon conserve son décor originel : fond au ciel feuillagé, corniches peintes de natures mortes. Les deux premières montrent fleurs, gibiers et fruits en bois de placage associés à des tissus. Le mobilier de Ribaillier-Mazaroz a été conçu pour cette pièce. Le buffet vitré à deux corps avec en partie basse des natures mortes à motifs de fruits et de gibier, sculptées, mélange les styles Renaissance et Louis XIII.
L’étage noble
L’escalier d’honneur
Le grand escalier qui mène à l’étage est constitué d’une première volée droite centrale et d’une deuxième volée double. Ses murs sont revêtus de stuc-marbre coloré ; à l’étage, il présente un décor à pilastres ioniques et deux toiles imposantes, « La Seine à Suresnes » (1867), par Émile Lambinet et une « Vue de Capri » par Félix Lanoüe (1812-1872). Sa rampe en fer forgé s’inspire du style Louis XIV mais en diffère radicalement par la technique. On y remarque le chiffre de l’ancienne Seine-et-Oise, formé de deux « S » entrelacés et d’un « O ».
Salle du conseil des ministres
En 1871, l’hôtel de la Préfecture de Versailles, libéré de l’occupation prussienne, devient la résidence d’Adolphe Thiers.
Dans cette salle, Adolphe Thiers présida le conseil des ministres du 18 novembre 1872.
A partir du photomontage du Conseil des ministres du 18 novembre 1872 à Versailles et après deux ans de travaux, fruit d’une collaboration entre plusieurs partenaires et coordonnée par la Direction des Archives départementales des Yvelines, la salle du conseil dans laquelle Adolphe Thiers tenait son conseil des ministres (de mars 1972 à mai 1873) a été recomposée dans son état initial. Les œuvres encadrées, copies des chefs-d’œuvre à l’aquarelle de la collection privée d’Adolphe Thiers, ont été réaccrochées sur les murs de la salle.
Le damas framboise de la Maison Lelièvre, similaire à celui employer à la restitution du boudoir de l’impératrice Eugénie à l’hôtel de Bourvallais, tapisse les sièges et panneaux en tenture.
La salle du Conseil général
Elle est intéressante par son décor situé en partie haute : plafond au ciel entouré d’une balustrade fleurie, corniche animée par des amours musiciens, des pots-à-feu et des oiseaux en relief. La cheminée monumentale était à l’origine ornée d’un buste de Napoléon Ier. En face, un tableau de Guillaume Dubufe (1853-1909) : « Allégorie de la Seine et de l’Oise », remplace le portrait de Napoléon III (l’œuvre est actuellement en restauration dans les locaux des Archives départementales des Yvelines).
Le Grand salon, dit « Salon des Aigles »
Il occupe tout le premier étage de l’avant-corps du pavillon central et reçoit le jour par six fenêtres. Ses murs sont revêtus de lambris en carton-pierre à trophées de musique. Des pilastres et colonnes à chapiteaux corinthiens en stuc-marbre animent l’ensemble. Une cheminée en brèche violette évoque le salon d’Hercule de Versailles.
Au plafond, les quatre Heures du jour d’Ernest Augustin Gendron (1817-1881) sont symbolisées par quatre jeunes femmes grandeur nature volant dans le ciel. Le Matin verse le contenu d’une urne, le Midi répand des fleurs, le Soir tient un sablier, la Nuit est étendue sur un nuage.
Quatre aigles dorés soulignent majestueusement les quatre angles de la corniche. Au centre des voussures sont représentées les quatre saisons : l’Hiver à la draperie verte, le Printemps à la draperie rose, l’Été à la draperie bleue et l’Automne à la draperie rouge. Elles sont l’œuvre de Félix-Armand-Marie Jobbé-Duval (1821-1889).
Salon de l’Impératrice
Il doit son nom au portrait de l'impératrice Eugénie, d'après Franz Xaver Winterhalter (1806-1873), qui s'y trouvait. Un autre portrait inspiré du même artiste vient depuis orner cette pièce. Au plafond, Dominique Henri Guifard (1838-1913) a peint un ciel encadré d'une balustrade, sur laquelle sont assis huit amours jouant avec des oiseaux. La corniche est marquée aux angles de l'emblème impérial «N» couronné. Deux allégories, «La Poésie et La Musique », sont représentées dans les dessus-de-porte dues à Félix Barrias (1822-1907), grand Prix de Rome en 1844. La garniture de cheminée -une pendule console à volutes grand modèle en marbre blanc avec ornements ciselés dorés et deux vases œuf en marbre blanc aux bouquets de lys à dix bougies- est l'œuvre de Chaumont-Marquis. Au sol, le tapis « Le Jour » est issu de la collection du Mobilier national et a été réalisé par la Manufacture national de la Savonnerie en 2001, d’après une œuvre de Marinus Boezem.
La grande salle à manger
Elle est revêtue de lambris en stuc-marbre imitant certains décors du château de Versailles. La corniche, ornée de trois frises en carton-pierre souligne le plafond peint par Dominique-Henri Guifard (1838- 1913), représentant un fond de ciel encadré par une galerie à balustres, au milieu desquelles courent des branches de feuillage et de fleurs. Sur la cheminée, une pendule d'époque Premier Empire présente sur son socle Orphée aux Enfers : reconnaissable à sa lyre, il arrive devant Hadès assis sur un trône, à l'arrière, se tient Eurydice voilée conduite par un petit amour qui porte un carquois.
ANNEXES
Iconographie
Hôtel de la Préfecture-Projet d’Amédée Manuel, façade principale, 1863 - 4N 21/6
Hôtel de préfecture. Façade principale, avenue de Paris. Dressé par l'architecte soussigné, Versailles, le 30 mars 1863. Amédée Manuel. Elévation. Tampon du ministère d'état, Conseil général des bâtiments civils. Projet approuvé dans la séance du 28 avril 1863. Papier entoilé, lavis encre de Chine, aquarelle 55 x 164,5 cm. 1863 4N 21/9
Vue d'ensemble de l'hôtel de la préfecture. Vue perspective. Aquarelle non signée d'Amédée Manuel. Projet datant de 1863. Papier, crayon noir, aquarelle 30 x 36,5 cm. 1863 - 4N 21 04- Archives départementales des Yvelines.
Hôtel de préfecture. Plan du rez-de-chaussée. Dressé par l'architecte soussigné, Versailles, le 30 mars 1863. Amédée Manuel. Plan au sol. Indication de la destination des pièces. Papier entoilé, plume encre de Chine, aquarelle 79,5 x 92 cm. 1863 - 4N 21 (1) Archives départementales des Yvelines
Hôtel de la préfecture. Plan du premier étage. Dressé par l'architecte soussigné, Versailles, le 30 mars 1863. Plan de niveau. Indication de la destination des pièces. Papier entoilé, plume encre de Chine, aquarelle 80 x 92 cm. 1863-4N 21 (2)
Projet d’Amédée Manuel, façade principale, 1863 - 4N 21/6 Le journal du siège de Paris par les Allemands, par Napoléon Peyrat, 1873 - 4M 1/67
Calendrier de la Préfecture annoté au départ des employés devant l’avance prussienne, 20 septembre 1870 - 4M1/65/1
Portrait d’Adolphe Thiers, 1877 - 7Fi 645
Photographies DAD
Photographies Préfecture des Yvelines
Bibliographie
Blic, Nicole de, L’hôtel de la Préfecture et du Conseil général des Yvelines, Itinéraires du Patrimoine, Versailles, 2001. Concours pour la construction d'un hôtel de préfecture et un casernement de gendarmerie, à Concours de l'hôtel de la préfecture, La Concorde de Seine-et-Oise, n°57, 17 juillet 1862. Coüard, Emile, L'administration départementale de Seine-et-Oise, 1790-1913 : législation, personnel, locaux, contribution à l'histoire du département, J. Aubert éditeur, Versailles, 1913. Houth, Emile, La préfecture de Versailles, article extrait du Bulletin de la Commission des Antiquités et des Arts, 1882. Levron, Jacques, Répertoire numérique de la série N des archives de l’ancien département de Seine-et-Oise (1800-1967), Versailles, Imprimerie La Gutemberg, 1968, 35 p. Préfectures, dans Revue M.H. n°178, décembre 1991 Versailles, La Concorde de Seine-et-Oise, n°50, 22 juin 1862.
Sources archivistiques
Série M : Administration générale et économie du département de la Seine-et-Oise 1800-1940
Série N : Administration et Comptabilité départementale 1800-1967
https://view.genial.ly/6373c168e958b800183779dc/presentation-conseil-departemental-des-yvelines-salle-du-conseil-des-ministres La préfecture des Yvelines - Services de l'État - Les services de l'État dans les Yvelines
Iconographie (yvelines.fr)