Les DAILLY, une dynastie trappiste depuis le XVIIIème siècle
Au XVIIIème siècle, Trappes, village agricole, possédait également un nombre intéressant de commerçants et d'artisans ; c'était une étape du relais de la poste aux chevaux et de la Poste aux Lettres, créées au siècle précédent.
Dans le même temps, Louis XIV lui avait fait vivre des transformations foncières importantes lors de la création de l'étang de Saint-Quentin, du grand parc de chasse entouré de murs et à la donation faite aux Dames de Saint-Cyr, des terres qui appartenaient avant à l'Abbaye de Saint-Denis. Les terres agricoles étaient gérées par des laboureurs qui devenaient de plus en plus souvent des fermiers receveurs . La taille des domaines fait d'eux des personnalités incontournables qui s'enrichirent au fil du temps et entretinrent des relations avec la noblesse et ont leurs entrées à la Cour. Ils ne sont en rien comparables avec la plupart des laboureurs qui vivent dans le reste du pays et certains d'entre eux sont anoblis.
Les Dailly sont une des familles qui vont s'illustrer à Trappes et dans le pays pendant plusieurs décennies. Leur destin est hors du commun.
Louis Dailly père est né à Théméricourt en 1715, il s'installe à Trappes après son mariage en 1734 avec Denise Valentin, fille du laboureur receveur de la seigneurie de Théméricourt, avec sa mère et son frère Denis. En 1745 il devient fermier des Dames de Saint-Cyr, puis en 1754, fermier royal de la Ferme du Trou d'Enfer à Marly-le-Roi.
Il a des enfants, dont Louis François qui lui succèdera à Marly le Roi et Gaspard qui lui succèdera à Trappes.
Un ouvrage écrit par Omer TULIPPE en 1934, Docteur en Géographie, Docteur de l'Université de Paris, Chef de Travaux au Séminaire de Géographie de l'Université de Liège "l'habitat rural en Seine-et-Oise, essai géographique de peuplement" est particulièrement bien documenté par des recherches aux archives Nationales et Départementales. Il note les cas de concentration foncière opérés au 18ème siècle, les dames de Saint-Cyr achetant elles-mêmes des domaines supplémentaires à Trappes. Dans l'extrait du rôle des tailles de 1770, Il relève que Louis DAILLY, alors Garde des Plaisirs du Roi est propriétaire de 200 arpents de terres labourables, tandis que Denis Dailly, son frère est fermier de 324 arpents de terres et jardins appartenant aux Dames de Saint-Cyr. En 1755, Louis avait acheté le fief de Montmort qui appartenait au seigneur d'Abos de Binanville.
A la Révolution, Gaspard DAILLY est mentionné comme ayant partie des membres de l'assemblée communale chargée d'établir le Cahier de Doléances de Trappes, mais cette assemblée s'étant montrée improductive, c'est une seconde assemblée qui fut réunie et le Cahier de Doléances porte en 1ère signature celle de "Louis DAILLY qui fut Garde des Plaisirs du Roi".
A la vente des biens nationaux, il va agrandir sa propriété de 66 arpents, achetant notamment les biens de l'église. Il décède en 1793 laissant ses biens de Trappes à Gaspard né en 1758.
Le privilège de la chasse royale constituait un frein au développement de l'agriculture, puisqu'il interdisait certaines cultures, imposait des contraintes sur le territoire pour favoriser la présence de tels ou tels gibiers. L'abolition des privilèges, réclamée d'ailleurs dans le cahier des doléances de Trappes, fut bienvenue pour moderniser enfin l'agriculture, introduire de nouvelles méthodes plus rentables, et se mécaniser.
Gaspard DAILLY se marie à Paris en 1783 avec Marie Charlotte COLLINET, fille d'un laboureur de Gonesse, cultivateur à Longperrier descendante aussi de fermiers receveurs. Il vit à Trappes où naissent ses enfants et où Il devient maire de 1796 à 1800 et de 1808 à 1811. Il décède en 1834 à Versailles. Entre temps, en 1826, selon le cadastre, il sera devenu le deuxième exploitant le plus important de la commune (après les Pluchet dont nous parlerons plus loin). Il s'est attaché à rassembler les parcelles agricoles.
Toujours en 1826, une deuxième exploitation DAILLY de 55 hectares a vu le jour le long de la Grande Rue, au sud de l'agglomération. D'après la généalogie de la famille, il s'agirait de celle de Louis-François, frère de Gaspard, cultivateur à Marly le Roi qui a épousé une demoiselle de Trappes, Marie Françoise BITROU, fille d'aubergistes. Ce couple n'a pas laissé d'héritiers directs après le décès de chacun, lui en 1859, elle en 1860.
Le successeur de Gaspard DAILLY, sera Claude Gaspard DAILLY, 1787-1849 qui, en épousant Anne Louise Sophie Lanchère de la Glandière, devient maître de la Poste aux Chevaux de Paris par succession de son beau-père, ainsi que le prévoyait son contrat de mariage et probablement en 1816 et il s'installe à Paris, rue Pigalle où il fait construire une nouvelle poste.
Il reste cependant cultivateur à Trappes, sa propriété fait près de 200 hectares et il exploite en location 28 hectares. Il emploie un régisseur
Il crée à Trappes une féculerie de pommes de terre qu'il finira par transformer en distillerie à betteraves. Il s'est intéressé aux assurances à la suite de dégâts provoqués par les orages, notamment "la Versaillaise" qu'il va contribuer à renflouer . Il en sera momentanément le directeur jusqu'à sa dissolution.
Il reçoit la Légion d'Honneur en 1838 pour ses travaux sur les questions agricoles.
Selon la généalogie de Gaspard, vue par Pierre Sénac dans Généanet, à Paris C.G. DAILLY noue des relations dans les milieux parisiens, notamment avec Odilon Barrot, précepteur de ses enfants. Attiré par les idées libérales, Il sera adjoint au maire du 2ème arrondissement de Paris. Il va élargir les activités de la Postes aux chevaux et acheter le services des "Diligentes". Il va inventer un système de participation pour ses postillons.
Il va marier son fils Adolphe à l'église de la Madeleine de Paris, en 1843 avec Thérèse Adélaïde FROCHOT qui descend d'agents de change, d'hommes de loi, d'hommes politiques parisiens;
Désormais, les DAILLY sont parisiens.
Gaspard Adolphe DAILLY dit Adolphe, est né le 14 juillet 1816 à Paris. Il succède à son père comme maître de la Poste aux chevaux, il hérite les terres de Trappes toujours tenues par un régisseur.
Il possède également une ferme à Bois-d'Arcy, commune dont il sera maire.
En 1852, il figure parmi les fondateurs et administrateurs du Crédit Foncier de France né sous l'impulsion de Napoléon III.
En 1855, il fit partie de la commission d'organisation de l'Exposition Universelle de Paris, à ce titre, il organise, les 1er et 2 aout ,une démonstration de machines agricoles venant de diverses parties du monde dans un de ses champs de Trappes, en la présence du Prince Napoléon-Jérôme Bonaparte, cousin de l'empereur. Ce fut à Trappes une très grande manifestation qui impressionna la population et la presse nationale venue en nombre sur les lieux. De nombreux habitants participèrent à l'accueil des visiteurs, des stands divers s'installèrent près des lieux.
Il est membre de la Société Nouvelle d'Agriculture de France, sorte d'ancêtre de la FNSEA, dont Emile Pluchet est président, Membre du Conseil de Perfectionnement de l'Ecole Centrale, Officier et chevalier de la Légion d'honneur.
Père de sept enfants, il transmet, la Poste aux Chevaux à Louis DAILLY (Gaspard Denis Louis) né en 1856 décédé en 1936 qui sera le dernier maitre des Postes aux Chevaux, l'automobile, le train et l'avion ayant eu raison de ce moyen de transports. Parmi les descendants d'Adolphe, on peut noter Etienne DAILLY, qui fut sénateur, président du Conseil Général de Seine-et-Marne, maire de Nemours, décédé en 1996. membre du Crédit Foncier. Par ailleurs, les Dailly restèrent propriétaires à Trappes jusqu'à la fin de la Grande Guerre. La famille est loin d'être éteinte.